Décès ou invalidité d’un associé en SELARL : anticiper pour protéger la société et assurer la continuité du cabinet
Le décès ou l’invalidité d’un associé dans une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) peut bouleverser la stabilité du cabinet et compromettre la poursuite de l’activité professionnelle. Contrairement à une SARL classique, la SELARL est soumise à des règles déontologiques et à des contraintes ordinales précises : seuls les professionnels inscrits à l’ordre peuvent détenir des parts sociales. La transmission aux héritiers ou au conjoint survivant ne se fait donc pas librement, et la société doit agir rapidement pour préserver la continuité de l’entreprise et la sécurité juridique du capital.
Anticiper ces situations est essentiel. Cela passe par une rédaction rigoureuse des statuts, un pacte d’associés clair, et la mise en place de garanties financières telles que l’assurance homme-clé.
Un risque majeur pour la stabilité de la société d’exercice libéral
Conséquences juridiques et ordinales : ce que prévoient la loi et les ordres professionnels
En cas de décès d’un associé exerçant dans une SELARL, ses parts sociales sont transmises à ses héritiers, conformément au Code civil. Cependant, la qualité d’associé ne leur est pas automatiquement reconnue. L’article 5 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative aux sociétés d’exercice libéral impose que la majorité du capital et des droits de vote soit détenue par des personnes physiques exerçant la profession concernée et inscrites à l’ordre.
Autrement dit : si les héritiers ne sont pas eux-mêmes médecins, chirurgiens-dentistes, pharmaciens ou kinésithérapeutes, ils ne peuvent pas conserver les parts sociales du défunt. Ils en deviennent propriétaires civilement, mais sans droit de vote ni droit d’exercice au sein de la société.
Les statuts doivent alors prévoir les modalités de rachat des parts, faute de quoi la SELARL se retrouve bloquée. L’ordre professionnel peut également imposer la cession obligatoire de ces parts dans un délai déterminé, afin de garantir que le capital reste exclusivement entre les mains de praticiens autorisés.
Cette règle est fondamentale : elle protège la déontologie et l’indépendance de la profession, mais peut créer une tension financière pour les associés survivants si la question n’a pas été anticipée.
Impact sur la gouvernance, la gestion et la continuité de l’activité
Le décès ou l’invalidité d’un associé perturbe la gouvernance de la société : quorum des assemblées, droits de vote, désignation du gérant, signature bancaire, etc. Le gérant en fonction doit rapidement :
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informer les héritiers des droits et obligations liés à la succession ;
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consulter le conseil de l’ordre pour valider la situation juridique du capital ;
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convoquer une assemblée afin de statuer sur le devenir des parts sociales ;
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et, le cas échéant, enclencher la procédure de rachat prévue par les statuts.
Si aucune clause n’a été prévue, la société peut se retrouver en indivision avec les héritiers, ce qui paralyse les décisions importantes et compromet la continuité de l’activité médicale ou paramédicale.
Les outils juridiques de protection : statuts, clauses et pacte d’associés
Les clauses essentielles à prévoir dans les statuts
Les statuts de la SELARL constituent le socle de la protection du cabinet. Ils doivent expressément encadrer le cas de décès ou d’invalidité d’un associé. Les principales clauses à insérer sont :
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Clause d’agrément : soumet l’entrée des héritiers à l’approbation des associés survivants. Si l’agrément est refusé, les parts doivent être rachetées par la société ou par les autres associés dans un délai raisonnable (souvent trois mois).
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Clause de rachat automatique ou d’exclusion : prévoit que les parts de l’associé décédé ou invalide sont rachetées selon une valeur déterminée par expert.
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Clause de continuation : assure que la société continue automatiquement avec les associés restants, même en l’absence d’accord immédiat sur la succession.
Exemple : « En cas de décès d’un associé, la société continue entre les associés survivants. Les héritiers du défunt ont droit à la valeur de rachat de ses parts, fixée conformément aux dispositions de l’article 1843-4 du Code civil. »
Ces dispositions préviennent les blocages et garantissent la pérennité de la société tout en respectant les règles ordinales.
Le rôle clé du pacte d’associés
Le pacte d’associés, complémentaire aux statuts, précise les modalités pratiques en cas de décès ou d’invalidité :
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évaluation de la valeur des parts sociales ;
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désignation d’un expert indépendant ;
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procédure de financement du rachat (emprunt, réserve, assurance) ;
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conditions de transmission et d’information des héritiers.
Le pacte d’associés peut aussi prévoir la désignation d’un successeur professionnel, agréé par l’ordre, afin de reprendre rapidement l’activité clinique du défunt.
Sa valeur est contractuelle : il engage les associés sans nécessiter de publication au registre du commerce, mais s’impose en interne comme un véritable outil de gouvernance.
Assurance et financement : le rôle de l’assurance homme-clé dans la continuité du cabinet
Principe et intérêt de l’assurance homme-clé en SEL
L’assurance homme-clé (ou assurance associée-clé) est un levier financier essentiel pour toute entreprise libérale. Elle a pour objet d’indemniser la société en cas de décès ou d’invalidité d’un de ses membres déterminants. Dans une SELARL médicale, la disparition d’un associé fondateur peut représenter plusieurs années de revenus perdus ; cette assurance compense la perte d’exploitation et finance le rachat des parts sociales.
Le bénéficiaire est la société elle-même, qui perçoit le capital garanti. Ce dernier peut servir :
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à payer le prix de rachat aux héritiers ;
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à recruter ou installer un nouveau praticien ;
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à préserver la trésorerie et la réputation du cabinet.
Modalités et fiscalité
Le contrat d’assurance est souscrit par la société. Les cotisations sont généralement déductibles du résultat imposable (article 39-1 du Code général des impôts), à condition que la société soit bénéficiaire directe du contrat. En contrepartie, l’indemnité perçue en cas de décès est imposable comme un produit d’exploitation.
Si le contrat vise spécifiquement à financer le rachat des parts de l’associé décédé, l’indemnité n’est pas imposable, mais vient en diminution du prix de revient des parts. Cette distinction, souvent méconnue, a un impact fiscal majeur et doit être précisée dans le contrat d’assurance et le pacte d’associés.
Exemple : continuité d’une SELARL médicale après le décès d’un associé
Une SELARL de trois chirurgiens-dentistes détient un capital de 90 000 €. Chacun souscrit une assurance homme-clé de 200 000 € au profit de la société. Au décès de l’un d’eux, la société perçoit le capital assuré, ce qui lui permet :
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de racheter les parts du défunt à leurs héritiers sans recours à l’emprunt ;
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de rémunérer un remplaçant ;
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et de poursuivre l’activité sans rupture.
Grâce à cette organisation, la société respecte les règles ordinales, indemnise équitablement la succession, et maintient la stabilité du cabinet.
Les réflexes à adopter pour les professions libérales
- Anticiper : mettre à jour statuts et pacte d’associés : Chaque SELARL doit réexaminer périodiquement ses statuts : clauses d’agrément, d’exclusion, de rachat et de continuation. Le pacte d’associés doit être actualisé à chaque modification du capital ou du régime de la société. Une mise à jour régulière limite les litiges et garantit que les dispositions restent compatibles avec la loi et les exigences des ordres professionnels.
- Prévoir les financements et informer l’ordre professionnel : Le gérant et les associés doivent s’assurer que les moyens financiers nécessaires à un éventuel rachat de parts soient disponibles : réserves, emprunt, ou assurance homme-clé. L’ordre professionnel doit être informé sans délai de tout décès ou changement de répartition du capital, afin de vérifier la conformité du capital social avec les exigences déontologiques.
- S’entourer d’un expert, d’un conseil juridique et ordinal :Les professions libérales doivent s’appuyer sur un expert-comptable et un juriste spécialisé pour organiser la succession professionnelle. En parallèle, un échange avec le conseil de l’ordre permet d’obtenir des réponses claires sur la qualité d’associé, les délais de cession et la gestion de la succession.
Anticiper, formaliser et assurer : ces trois réflexes garantissent la pérennité de la société et la tranquillité des associés comme des héritiers.
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